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Je vous demande de vous arrêter…
Ne cherchez pas de solutions économiques dans les propositions de partis politiques extrêmes, FN en tête, il n’y en a tout simplement pas. Le moteur de leur attractivité ne se situe pas dans des solutions rationnelles mais dans la crainte émotionnelle d’un avenir construit à l’aide de réflexions du passé.

Grâce à une rhétorique nationaliste nostalgique très en vogue actuellement avec pour exemples le « Make America Great Again » de Donald Trump, ou encore le clip officiel de Marine Le Pen qui parcourant un album photo prononce « D’aussi loin que je me souvienne », ces partis figent les électeurs dans un passé idéalisé et leur fournissent sciemment des axes de repères désuets et donc inadaptés au monde futur. L’objectif de ces repères passéistes est de projeter les électeurs dans un avenir nécessairement incertain afin de les rassembler et accentuer un sentiment décliniste autour duquel ils fédèrent.

Il s’agit ici d’une approche réfléchie et porteuse : L’aversion au risque comme démontré par la théorie des perspectives (prix Nobel 2002) a davantage de poids que l’espérance de gain futur.
En d’autres termes, nous apprécions l’environnement que nous connaissons, craignons de le perdre et n’évaluons pas les bénéfices d’évolutions futures. Pourtant, ces évolutions bénéficieront à d’autres et accentueront une nouvelle fois le sentiment de déclin…Le cercle vicieux est alors installé.

Après avoir instauré une peur pugnace à l’encontre de tout et tous, relayée notamment par les Fake News ou par les média de type « Breaking news », les partis extrêmes annoncent des solutions nationalistes populistes et sont attentivement écoutés car finalement, face à ce danger imminent intangible, nous n’avons pas le choix : il nous faut nous refermer sur nous-mêmes afin de paradoxalement redevenir puissants. Logique basique de la communication : limiter le cadre de pensée, faire peur, énoncer des solutions, rassembler.

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Malthus et ressource limitée vs Schumpeter et innovation
Afin d’illustrer la notion de cadre conceptuel fixe, pilier de la rhétorique des nationalistes déclinistes, il est nécessaire de présenter deux courants de pensées économiques, celui de Malthus et celui de Schumpeter.

La théorie Malthusienne a parfaitement expliqué la croissance jusqu’au milieu du 19ème siècle en faisant intervenir deux facteurs pour un résultat : Facteur population + Facteur Terre = Productivité.
Prenez un champ, confiez le à un paysan, son gain de productivité sera élevé.

Cependant, selon Malthus, lorsque la population atteint un certain niveau, les gains de productivité commencent à décroitre et contraignent les pays à une stagnation économique (principe de trappe malthusienne). Prenez le même champ, confiez le maintenant à un millier de paysans, les gains de productivité par tête seront faibles. De plus, l’exploitation intensive fera apparaître des rendements décroissants du fait d’une terre devenue moins fertile car trop sollicitée.

Il faut donc réguler la population en limitant la natalité et l’immigration ou pire préparez la guerre afin d’acquérir de nouvelles terres afin de retrouver des gains de productivité. La Chine, qui a pendant très longtemps vu sa productivité stagner contrairement à celle de l’Europe du début du 19ème siècle, a misé sur le facteur « Population » et mis en place une politique restrictive de natalité. Les défenseurs de la décroissance se focalisent quant à eux sur le résultat (niveau de croissance), craignant la modification des facteurs (OGM pour accroître la capacité des terres par exemple). Les USA sont entrés en guerre en Irak en 2003 afin de prendre le contrôle sur des terres et ainsi contrôler ses ressources énergétiques (basées sur les énergies fossiles).

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Pour Malthus, le lien entre gain de productivité et population s’effectue dans le cadre fixe d’une ressource limitée, celle de la terre. Là s’arrêtent les réflexions des partis politiques extrêmes, dans un cadre fixe comme l’était la ressource terre pour Malthus.

L’économiste Schumpeter va ouvrir ce cadre conceptuel en jouant sur la variable ressource démontrant qu’il est possible de la faire évoluer, de l’accroître voire de la remplacer grâce à l’innovation, pilier de sa théorie. Le fait de trouver de nouvelles « terres » selon le sens de champs d’innovation refait ainsi apparaître l’espérance de gains de productivité à population croissante et permet de minimiser les risques de guerre.

Les paysans aux gains de productivité les plus faibles, source de pauvreté trouveront des débouchés dans d’autres secteurs nouvellement créés, sources de prospérité à condition d’ouvrir l’école à tous (y compris les immigrés). Si les USA avaient massivement investis dans l’innovation liée à l’énergie solaire, la guerre d’Irak de 2003 pour un contrôle de l’énergie n’aurait probablement pas eu lieu.

« Si j’avais demandé aux gens ce qu’ils voulaient, ils m’auraient répondu des chevaux plus rapides » – Henry Ford
En citant la phrase prêtée à Henry Ford, « Si j’avais demandé aux gens ce qu’ils voulaient, ils m’auraient répondu des chevaux plus rapides » les deux cadres apparaissent clairement :

  • celui de ceux qui réfléchissaient dans un cadre fixe, dans un cadre qu’ils connaissaient : le transport équestre qui entre parenthèse faisant prendre le risque à Paris d’être recouverte par deux mètres de crottin et,
  • celui de ceux qui réfléchissant dans un cadre ouvert : un nouveau mode de transport, l’automobile. Ce nouveau champ ouvre la voie de la destruction (des transports équestres) créatrice (des transports automobiles), chère à Schumpeter.
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Ceci demande néanmoins une capacité d’ouverture et d’adaptation au monde nouveau, capacité que les partis extrêmes ne suscitent absolument pas préférant projeter les électeurs vers l’avenir avec les éléments de réflexion du passé. Le monde actuel n’est pas celui d’hier et ne sera certainement pas celui de demain. Ne pas évoluer en ouvrant le cadre de pensée, en imaginant ce qui n’est pas, c’est disparaître selon une logique très darwinienne et c’est ce que proposent les partis extrêmes en défiant l’avenir plutôt que le passé.

Cédric